Pour pouvoir relever les défis de demain, nul ne contestera que l'éducation des jeunes à l'usage des nouvelles technologies de l'information et de la communication doit faire partie intégrante de la réalité d'aujourd'hui.

Tous les ados ?

Comme tout autre adolescent, le jeune déficient visuel ne peut plus considérer que seule la qualité de son bagage intellectuel va lui assurer une intégration sociale réussie. La notion même de « performance » s'élargit. Autonomie, capacité de dialoguer, facultés de recherche et d'analyse, sont autant de « savoirs- faire » devenus nécessaires à l'exploitation professionnelle et sociale des connaissances scolaires.

Apprendre à tous futurs citoyens à utiliser les logiciels de courrier électronique et de navigation sur le WEB, les faire participer à des forums ou groupes de discussion, c'est donc leur donner la maîtrise de nouveaux outils qui leur seront indispensables demain. C'est aussi leur inculquer comment gérer l'information car, si la diversité et la richesse des supports sur INTERNET (texte, image, audiovisuel) stimulent une démarche créative et une analyse critique de la part de ses utilisateurs, elles favorisent également l'émergence de vitrines médiatiques et commerciales.

L'engouement pour le multimédia suscite l'apparition de nouveaux langages de programmation qui, pour séduire, privilégient les effets d'animation et d'interactivité au détriment d'un accès à l'information aux handicapés visuels. Qu'adviendra pour les handicapés visuels si l'évolution technologique les laisse pour compte? « Le handicap visuel complique, il ne détermine pas le devenir adulte » disent certains? Si personne n'y prend garde, cette affirmation sera-t-elle toujours d'actualité ?

Le projet initial

Sensibilisé par les enjeux de ce débat de fond, le CIGER, concepteur de logiciels destinés aux communes et CPAS wallons et bruxellois, créateur de sites, fournisseur de services destinés aux entités locales et régionales, a entrepris de mener à bien un projet peu commun : apprendre à des jeunes handicapés de la vue à surfer sur INTERNET et à utiliser des services interactifs tels que les forums, le courrier électronique, le chat.

Le but de cette expérience menée avec le soutien de la Région Wallonne (Numéro vert 0800-1 1901), est de rompre l'isolement de ces jeunes non-voyants et de faciliter leur intégration dans le monde des voyants.

A ce jour, Olivier, Gwennael, Amélie, Kimberley et Marie se sont lancés dans l'aventure. Ce qui les unit : une folle envie d'apprendre et une volonté manifeste de se battre contre leur handicap.

Comme tout adolescent, ces filles et garçons, âges de 12 à 18 ans, ont perçu au travers de l'utilisation des nouvelles technologies de l'information, la possibilité de s'affirmer auprès de leurs parents, mais aussi des jeunes de leur âge. Leur participation à des forums leur permet de rencontrer virtuellement des adolescents sans handicap visuel : ils s'intègrent tout naturellement au groupe et peuvent ainsi s'identifier à eux.

L'apprentissage et les loisirs, trop souvent cloisonnés, se retrouvent ici. La voile, le football, l'équitation sont autant de passions qu'ils redécouvrent, avec d'autres sensations. Via le Web, ce groupe d'adolescents a découvert par lui-même des domaines d'autonomie insoupçonnés dans le cadre de recherches d'informations.

Les limites du projet initial...ou pourquoi ce site ?

Après avoir oeuvré dans un premier temps, pour dépasser les limites techniques que pose pour eux l'utilisation des outils, après avoir ensuite goûté aux joies de la rencontre virtuelle, le plus généralement entre eux, ces jeunes non-voyants ont exprimé le désir de pouvoir rompre leur isolement et étendre leur horizon par le biais d'échanges dont les sujets viseraient à faciliter leur intégration dans le monde des voyants mais aussi, et surtout par rapport à des axes de réflexion communs à tout adolescent. Ceci ne pouvait se faire qu'en intégrant ce projet dans un cadre plus général favorisant les activités centrées sur l'échange et la collaboration entre jeunes.

Ce site n'est pas un site pour non-voyants : c'est simplement un site pour ados, qui a également comme objectif d'être une « passerelle » entre des adolescents non voyants et d'autres jeunes, âgés de 12 à 18 ans, motivés par l'utilisation d'Internet. Pour que cette passerelle fonctionne, elle doit toutefois être conçue sur base de règles ergonomiques et techniques prenant en compte certaines caractéristiques du handicap visuel. C'est pourquoi, certains modes de présentation ou d'interaction ont été évités sur ce site, alors que d'autres ont été privilégiés. Ce site n'est donc vraiment pas un site pour non-voyants ; il est seulement conçu pour répondre au mieux à la réalité d'Internet pour les déficients visuels.

INTERNET : une réalité pour les jeunes déficients visuels.

Aussi générique que le terme puisse paraître, le concept d'INTERNET recouvre en fait une diversité de services. Surfer, recevoir et envoyer du courrier, participer à un groupe de discussion, sont autant de vecteurs d'information et de communication qui, par leurs particularités techniques, sont ou non accessibles aux déficients visuels.

Le Web

Le langage HTML généralement utilisé pour la production des pages Web est conçu pour donner accès au texte lui-même. Le fait de naviguer sur Internet ne pose donc pas trop de problème si :

• Les pages utilisant abondamment le graphisme double cette information sous forme textuelle
• Les sites n'utilisent pas les « frames » ou « fenêtres multiples »
• Les pages ne comprennent pas de tableaux
• Les pages visitées ne font pas appel à de nouveaux langages de programmation tels que « Java Script ».

Nuançons toutefois cette affirmation par les remarques suivantes :

• La structuration spatiale d'une page Web est renforcée, pour un voyant par un éléments graphiques. Ces repères sont inutilisables pour un non voyant.
• La présence d'un lien hypertexte dans un site est identifiable par des indices visuels (modification de l'apparence du curseur,variation de couleur) mais aussi par l'utilisation de « touches fonctions » du clavier. Si les indices visuels permettent aux voyants un repérage direct du lien hypertexte pertinent par rapport à leurs centres d'intérêts, l'emploi d'une touche fonction ne propose qu'une identification séquentielle des liens hypertextes. Ceux-ci sont ainsi présentés indépendamment de leur contexte (l'information explicative associée au lien n'est pas communiquée). Notons en particulier que la plupart des outils de recherche privilégient la présence de graphisme (publicité multiple) et de « frames ». La réalisation de la recherche et l'accès aux résultats qui en découlent s'avèrent de ce fait fastidieux.

  A ce jour, le groupe des adolescents utilise « Yahoo », un outil de recherche permettant d?introduire une requête en français et ne comprenant pas de frames.

• Constatons également qu'il est impossible d'imprimer un site en Braille. Il faut, via des manipulations « Copier/Coller », intégrer l'information dans un logiciel de traitement de texte, puis seulement l'imprimer.

Les forums

(A ce jour, seuls les forums mis en ligne sous forme de pages Web ont été expérimentés.)

Ce n'est pas la participation à un forum qui constitue un problème mais plutôt les caractéristiques du site qui le supporte. En effet, si le forum est intégré dans un site Web simple, le déficient visuel y accède et y participe facilement. Par contre, si le site qui l'intègre comporte des fenêtres multiples et/ou du graphisme non doublé de texte, le forum devient inaccessible sans l'aide d'un voyant.

La participation à un forum a fortement motivé les jeunes adolescents. Ils pouvaient dialoguer avec autrui comme n'importe quel jeune « branché sur le Web », choisir ou non d?annoncer leur handicap, ?

Le courrier électronique

Globalement, l'utilisation du courrier électronique est techniquement plus aisée que la recherche d'informations sur le Web.

• La lecture de messages ne pose aucun problème aux adolescents
• L'envoi d'un courrier est simple à la condition de n'avoir qu'à sélectionner une adresse introduite préalablement dans un carnet d'adresses électronique ou si l'adolescent connaît de mémoire les coordonnées de son interlocuteur
• Cet outil constitue aux yeux du groupe un formidable canal de communication. Il apparaît comme totalement novateur et porteur d'une ouverture sur « un autre monde », celui qui ne s'inscrit pas dans un « espace de proximité habituel».
• La recherche et l'implication d'adolescents voyants ont permis au groupe d'adolescents de s'intégrer dans un tissu de relation sans que leur handicap ne pose problème. Cette intégration a été perçue comme très stimulante.

Comme pour le Web, notons toutefois que l'importance des artifices visuels mis en oeuvre dans cet environnement réduit la convivialité de l'outil: message lu/non lu, degré d'urgence, boîte courante, ?

Le chat

Cet outil est le plus aisé à utiliser pour un non voyant. Usez-en et abusez-en !