EURO-REPORTAGES - FLORENCE

F. Canteruccio : «Renouer
avec un théâtre populaire»

Texte et photos : Christel Rasquinet - Athénée deDurbuy

Septembre 1996

 

Fulvio Canteruccio: «Arracher le spectateur à son fauteuil»

Cité à vocation essentiellement culturelle, Florence est-elle aussi un paradis pour les amateurs du théâtre ? Nous avons posé la question à Fulvio Canteruccio, acteur et récemment assistant de Sergio Staino pour la mise en scène de « Valser » d’Alberto Severi.

Pour Fulvio Canteruccio, il faut absolument rendre au théâtre sa vocation populaire et pour cela, revenir à un théâtre simple, rapide, qui frappe comme un tableau. Les textes doivent interpeller.
Pour détourner les gens de leur écran de télévision et les arracher à leur fauteuil, il faut pratiquer des prix démocratiques. En Italie, une place au théâtre coûte environ 80 000 lires (1 600 FB). Dans son théâtre, Canteruccio propose des places à 20 000 lires (400 FB). Il attire ainsi un public jeune.
Le théâtre n’est pas un métier simple. Dans ce domaine, on n’est jamais sûr de rien et, à Florence comme en Belgique d’ailleurs, devenir acteur suppose un véritable parcours du combattant. Trop souvent, selon Fulvio Canteruccio, les candidats-acteurs manquent de simplicité et s’abandonnent trop vite au « moi je ». Il faudrait absolument qu’ils redeviennent, en priorité des artistes.

« Aussi simple qu’un plat de spaghettis »

Marcel Duchamp disait : « Le théâtre, c’est aussi simple qu’un plat de spaghettis ». Un avis que partage Canteruccio. Si vous regardez de tout près un plat de spaghettis, il est vrai, qu’au départ, cet enchevêtrement de fils peut paraître bien compliqué à dénouer.
Un peu de courage, beaucoup de dextérité au début, de la bonne volonté aussi et s’en est fait du nœud. Les fils glissent et s’enroulent autour de la fourchette pour le plus grand plaisir de la bouche.
Certains s’aident en utilisant une cuillère, d’autres, trop prudents, taillent lamentablement... Ceux-là ne connaîtront jamais le vrai plaisir du spaghetti.
« Au théâtre, c’est exactement la même chose, explique Fulvio Canteruccio. Cela semble insurmontable au début. Mais si on se lance, si on fait preuve de courage et de volonté... on goûte alors le plaisir suprême. »

Un apprentissage coûteux

Canteruccio se considère comme un acteur privilégié car il travaille dans une compagnie à caractère familial, Krypton, fondée en 1980. Il a un salaire fixe et fait du théâtre-recherche. Régulièrement, la compagnie organise des semaines consacrées à la philosophie, à l’art visuel ou à la poésie.
La compagnie monte beaucoup Beckett. Elle est d’ailleurs surtout connue pour cela. Le public est en général jeune et florentin. Des touristes viennent parfois gonfler les rangs du public habituel.
Krypton organise aussi des cours : ceux-ci sont payants et se donnent trois fois par semaine. Mais pour devenir acteur de théâtre, il faut aussi aller à l’école : cette formation réclame deux à trois ans d’études. Un apprentissage qui, de l’aveu même de ceux qui l’ont suivi, s’avère intransigeant et coûteux.