Jeudi 26/09/1996 à 18:40:01

La vallée de la rhubarbe noire


Pour les riverains, la RN 66, qui relie Mulhouse à Epinal par la vallée de la Thur, "c'est le bordel!" Problèmes de circulation, nuisances sonores, pollution... La liste des doléances est longue.

Dominique, 42 ans, habite Vieux-Thann: "Il y a des bouchons à n'en plus finir, la circulation est horrible, surtout en ce qui concerne les routiers, et la limitation de vitesse n'est pas respectée. Certains essayent de doubler malgré les îlots. Depuis que le tourne-à-gauche a été supprimé au carrefour Garnier, c'est devenu impossible. Et le lundi matin, c'est une catastrophe pour aller à Mulhouse: on met trois quarts d'heures au lieu d'un!" Sur le trottoir, on trouve à la fois des piétons, des cyclistes et des voitures stationnées, qui, en plus, n'utilisent pas toujours les emplacements réservés. D'où un problème évident de sécurité. Et l'on plaint les services d'urgenc, qui sont contraints aux contresens ou même aux détours.

GOULOT D'ETRANGLEMENT

Le problème se retrouve à Saint-Amarin, véritable goulot d'étranglement, là encore, depuis les travaux de contournement. Pour Alain, 48 ans, pompier volontaire, l'évacuation en cas d'accident devrait se faire par les trottoirs ou les ruelles attenantes. De plus, il rencontre des problèmes dans son métier de livreur, car après 16h, le temps de trajet est multiplié par deux... A Willer-sur-Thur, on se plaint de la circulation, même le dimanche soir. Ceux qui se rendent en montagne, le week-end, pour profiter de l'air pur retrouvent avec le bonheur qu'on imagine, l'odeur des gaz d'échappement dans des bouchons d'une bonne heure. Mais ceux-çi se produisent aussi tout au long de la semaine: dans la vallée de Thann, on compte en effet une moyenne 21 000 véhicules par jour, dont 6 000 camions. La pollution n'est pas le moindre des problèmes. On s'habitue aux mauvaises odeurs, même à Vieux-Thann, où s'ajoutent encore celles dégagées pas les cheminées de l'usine de produits chimiques. Mais être riverain de la RN 66, c'est aussi devoir laver les fenêtres deux fois plus souvent, essuyer les carreaux toutes les semaines et frotter les portails tous les quinze jours. C'est également le balayage des trottoirs deux fois par semaine, et pour avoir des façades impeccables, il faut utiliser le nettoyeur haute pression industriel tous les

six mois. Et en hiver, avec le sel de déneigement abondamment répandu sur les routes, giclant sur les façades, c'est encore pire. Difficile aussi de faire son jardin le long de la route... Yvette, 50 ans, de Willer-sur-Thur, précise que les gaz d'échappement noircissent ses rhubarbes: heureusement que ça se pèle! Autre problème: les nuisances sonores. En souffrent surtout ceux dont le sommeil est léger. Certains s'y habituent facilement, d'autres sont obligés de prendre un somnifère. Le bruit de la circulation dérange même ceux qui habitent pas directement à côté de la route. Dur, dur de trouver le sommeil réparateur, quand on sait que le passage des camions s'effectue de façon intensive dès 3h du matin... André, Vieux-Thannois de 64 ans, se plaint aussi de dégats matériels dus aux vibrations déclenchées par le passage de poids-lourds. C'est vrai: les fissures sont bien visibles sur sa façade.

DEVIATIONS

La déviation prévue depuis des années sera-t-elle la solution? Ne serait-ce pas simplement déplacer le problème? Voire en créer d'autres? A Saint-Amarin, où le contournement de la cité est déjà bien avancé, un pont soulève la polémique: trop bas, il oblige à effectuer un contournement par Fellering, ce qui rallonge le trajet (8km au lieu de 500m) pour les véhicules de plus de deux mètres de haut: les véhicules de secours, par exemple... Les riverains de la déviation restent aussi sceptiques quant à l'efficacité future du mur anti-bruit, qui, par ailleurs, les priverait de soleil. Cependant, il est vrai que l'utilisation de la déviation par les camions en transit pourrait faciliter la circulation des riverains de l'actuelle RN 66. Certains soutiennent donc ardemment le projet de la déviation. Le maire de Thann Jean-Pierre Baeumler déclare ainsi: "La modernisation de la route s'impose. Il faut aussi penser aux modes de transports collectifs et individuels: trains, vélos... et les développer. Le projet doit être porté par toute la population." Mais, en attendant la déviation dans 15 à 20 ans, les riverains devront encore supporter stoïquement toutes ces nuisances.

C. FELBLINGER, R. LUTTRINGER et M. MURER

L'ALSACE D'UN JOUR
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Posté le Jeudi 26/09/1996 à 18:40:01
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